Sodepsi 2020-03-11
Les Gabonais,
ils veulent ça !
La révolution en marche dans le marketing d’entreprise au Gabon : comprendre les enjeux de la communication digitale pour les entreprises.
Ceux de nos lecteurs qui ont déjà travaillé dans la communication au Gabon ont certainement déjà entendu un responsable marketing expliquer au cours d’une séance de travail avec force conviction que « Les Gabonais, ils veulent ça ! ».
Cette assertion résume en fait à elle seule le paradoxe dans lequel se trouve la communication d’entreprise au Gabon en 2020. Depuis moins d’une dizaine d’années, les entreprises gabonaises s’investissent de plus en plus sur la communication digitale. Ces nouveaux canaux de communication représentent une aubaine pour les communicants du pays, face à une offre d’affichage urbain en flagrante inflation et des coûts de diffusion radio et télévisés encore très prohibitifs ! Avec un coût contact moyens de moins de 1 francs CFA (20 à 30 fois inférieur à la presse papier nationale), Facebook se positionne clairement comme un incontournable ! Mais ce que la plupart des services communication des entreprises n’avaient pas prévu, ce sont les mutations profondes du secteur que la digitalisation drainerait avec elle !
En développant la communication digitale dans l’entreprise, les acquis dans la connaissance du marché se trouvent vite supplantés par les contributions réelles et directes des consommateurs. En d’autres termes, avant nous devions nous imaginer ce que les Gabonais apprécient, mais dorénavant nous n’avons qu’à écouter ce qu’ils disent !
Mais loin de menacer la précieuse expérience des commerciaux et marketteurs qui sillonnent le marché, appâtent le chaland et questionnent le badaud, la digitalisation doit au contraire ajouter une nouvelle corde à leur arc : celle de l’analyse du « sentiment client ».
Il s’agit pour les services marketing d’apprendre à recueillir, organiser et analyser ce nouveau flux d’information, qui paraît à première vue informe et inexploitable. Outre les outils d’analyses numériques, dont nous ferons l’économie de démonstration ici, il semble essentiel de pouvoir faire de ces remontées des outils tangibles qui aident la prise de décisions stratégiques.
L’exercice n’est pas inconnu puisqu’avant les réseaux sociaux et leurs flots de commentaires, messages privés et « likes », nous avions souvent recours à des sondages et des enquêtes d’opinions. Mais avec leurs prix exorbitants et leurs panels restreints, ils se sont souvent révélés des outils occasionnels, voir exceptionnels.
Nous avons aujourd’hui à faire à un flux continu et important de messages et de contributions. Alors quelle importance leur accorder ? Comment les prendre en compte dans nos stratégies ?
« On va encore faire comment ? »
La première étape est résolument celle de l’abandon de nos vieilles habitudes. Arrêtons de prendre nos décisions à l’aune de nos considérations et expériences personnelles. La plupart du temps, ceux qui élaborent les stratégies marketing ne font pas partie de la cible. Si la stratégie que nous élaborons doit correspondre à une cible bien précise, commençons par écouter ce qu’elle a à nous dire !
Nous devons donc apprendre à impliquer nos cibles dans l’élaboration de nos stratégies. Pourquoi ne pas simplement leur demander ce qu’elles souhaitent ? C’est comme pour les cadeaux de Noël : Quand on est enfant, on nous offre des cadeaux « surprises », en entourant cela d’un cortège de croyances merveilleuses, avec des cerfs qui tirent un traineau magique et des lutins qui fabriquent des jouets. Et puis en grandissant, les croyances se désagrégeant (les parents qui le regrettent devraient cacher les catalogues de jouets) et on commence à nous demander ce que nous voudrions pour Noël. Les consommateurs Gabonais ne sont donc plus des enfants à qui nous devons faire croire au Père Noël. Nous devons commencer à les considérer comme ce qu’ils sont vraiment : des personnes informées, qui voient ce qui se passe dans le monde, qui ont accès à nos processus et qui ont des attentes. Alors commençons à leur demander ce qu’ils aimeraient comme cadeau !
Par exemple, sur la page Facebook de notre bière nationale, la Régab, nous demandions il y a quelques mois aux fans, de façon assez anodine, des idées de slogans pour la marque. En moins de deux semaines, nous comptabilisions déjà plus de 900 contributions, dont certaines rivalisaient d’efficacité et de pertinence avec celles des meilleures agences ! Cela montre à quel point les consommateurs sont aujourd’hui demandeurs pour être impliqués dans l’élaboration et la vie de leur marque !
Nombre d’entreprises redoutent l’avis des consommateurs. Pour la simple raison que les processus ne nous apprenaient jusqu’à présent qu’à gérer les « plaintes » … Mais les retours d’expériences sont formels : il y a une grande majorité de contributions constructives et positives dès lors que nous donnons la parole aux consommateurs !
Il faut donc penser le digital en amont. Bien souvent, la digitalisation de la communication se résume à décliner au format web des campagnes déployées sur le terrain. Considérés ainsi, ils ne sont qu’une massue de plus qui tente de convertir aveuglément le premier prospect à sa portée.
Les médias de communication digitaux doivent plutôt être considérés comme des laboratoires qui nous permettent d’améliorer l’adéquation entrer les attentes des consommateurs et les innovations de la marque. Alors tendons l’oreille !
« Pour nous quoi, makayas »
Le changement nécessaire dans l’élaboration des stratégies marketing appelle également in fine une évolution dans les usages des internautes. Si les communicants apprennent à tendre l’oreille, il faudra bien que les internautes également, apprennent à formuler leurs attentes.
Il n’est pas rare de compiler quantité de contributions stériles des internautes. Des critiques sans fondements, des rejets catégoriques et non motivés, des invectives, du complotisme de bas étage et bien sûr pléthore de noms d’oiseaux. Nous devons considérer cela comme les symptômes des années passées à ne pas tendre l’oreille. Les frustrations accumulées qui résurgent à l’ouverture d’un nouveau canal d’expression direct. A l’image des sédiments dans les tuyaux d’adduction d’eau, il suffit de laisser couler quelques minutes pour que l’eau devienne claire.
Un mal nécessaire donc, au regard de la portée exceptionnelle de ce nouveau mode de collaboration entre marque et consommateurs qui se profile à l’horizon. Le meilleur moyen pour qu’une cible s’approprie un slogan demeure que ce slogan vienne de cette même cible !
Si nous voulons être les poissons les plus rapides, nous devons arrêter de nager à contre-courant, et apprendre à surfer sur les vagues de ce tumultueux océan de possibilités que nous offre le digital !